Par Jacques Sapir
28 septembre 2013
Crédit Photo : La Voix de la Russie
Le vote par le Conseil de sécurité des Nations Unies, dans la nuit de vendredi 27 au samedi 28 septembre de la résolution sur les armes chimiques en Syrie, co-présentée par la Russie et les Etats-Unis, a été un moment important dans la reconstruction d’un ordre international. Ce vote, obtenu à l’unanimité des 15 membres du Conseil de sécurité, présente plusieurs points qui appellent des commentaires :
•(i) Il fait obligation à toutes les parties en présence en Syrie de remettre les armes chimiques qu’elles détiennent aux Nations Unies à fin de destruction. Il enjoint à toutes les parties en présence de cesser la production ou le transfert de ces armes.
•(ii) Il réaffirme solennellement que la prolifération des armes de destruction massive est une menace pour la paix et la sécurité.
•(iii) Il réaffirme la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Syrie.
•(iv) Il précise qu’en cas de violation par l’une des parties de l’accord, le « chapitre VII » de la charte s’appliquera, soit qu’il y aura une nouvelle réunion du Conseil de sécurité et qu’il faudra un nouveau vote avant l’engagement de la force armée.
Ce vote est incontestablement une victoire pour la Russie, comme le soulignent tous les observateurs. Toutes les parties impliquées dans la crise Syrienne, à commencer par la France et les Etats-Unis, ont dû accepter de se plier à la légalité des Nations Unies. Il ne peut, dans ces conditions, y avoir de frappes « décidées unilatéralement. Cette victoire de la Russie est aussi, et surtout, une victoire du Droit International. Mais, c’est aussi une victoire pour la Russie car la résolution reconnaît le gouvernement légal de la Syrie comme son interlocuteur et le désigne comme tel dans la tenue d’une conférence de paix qui doit se tenir à Genève. Dès lors, il ne saurait y avoir de préalable, et en particulier le départ de Bachar el-Assad. De fait, les Etats-Unis et la France ont été isolés, non seulement face à la Russie mais aussi face aux « BRICS » et à une grande majorité de pays, et ont dû accepter la logique de la position russe.
Cette victoire de la Russie est historique. Elle signe tant la cohérence de sa politique étrangère, mise en œuvre par son Président Vladimir Poutine et par son Ministre des affaires étrangères M. Serguey Lavrov et qui a fait de la défense de la légalité internationale sa pierre angulaire, que le changement de rapport de force international. Mais, cette victoire confère de nouvelles responsabilités à la Russie. Désormais on attendra d’elle non pas tant une position réactive qu’une position pro-active sur les différentes crises internationales.
Cette victoire de la Russie doit aussi être mise en parallèle avec l’effacement de l’Europe et l’échec de la France. Cet échec est humiliant.
La France s’est retrouvée isolée, et n’a pas été partie aux négociations de Genève entre la Russie et les Etats-Unis, négociations qui ont rendu possible le vote de cette résolution. Cet échec est celui, en profondeur, de la politique étrangère suivie par notre pays. Échec qui est le prix de l’incohérence : comment concilier l’action au Mali au début de cette année (dont on oublie trop vite qu’elle a été rendue possible par la mise à la disposition d’avions-cargos russes pour assurer la logistique) avec la position sur la Syrie. Échec qui est le prix d’une absence de doctrine, ou plus précisément de la montée du moralisme à la place d’une pensée politique réelle. Échec, enfin, dans la capacité à unir l’Union Européenne sur nos positions. Jamais l’Union Européenne n’est apparue autant divisée et sans position dans l’arène internationale. La France à cru beaucoup sacrifier à la construction européenne dans l’espoir qu’elle en tirerait avantage sur le plan international et que sa position en ressortirait renforcée. Elle doit aujourd’hui déchanter. Les sacrifices de souveraineté n’ont pas abouti à la constitution d’une position unifiée de l’Union Européenne. Ils ont par contre redonné une légitimité à l’Allemagne comme grande puissance.
De cet échec, il faudra impérativement en tirer les leçons et faire le bilan de vingt années de « construction européenne ». Mais il faut aussi que M. Laurent Fabius tire personnellement le bilan du vote de cette nuit au Conseil de Sécurité, au vu de son activité et de son activisme des mois derniers, et qu’il assume sa responsabilité dans cet échec en démissionnant.
Jacques Sapir
Ses travaux de chercheur se sont orientés dans trois dimensions, l’étude de l’économie russe et de la transition, l’analyse des crises financières et des recherches théoriques sur les institutions économiques et les interactions entre les comportements individuels. Il a poursuivi ses recherches à partir de 2000 sur les interactions entre les régimes de change, la structuration des systèmes financiers et les instabilités macroéconomiques. Depuis 2007 il s’est impliqué dans l’analyse de la crise financière actuelle, et en particulier dans la crise de la zone Euro.*
Publié par : http://www.comite-valmy.org
http://cequelesmediasnenousdisentpas.over-blog.com/article-la-demission-de-laurent-fabius-s-impose-la-victoire-de-la-russie-par-jacques-sapir-120307171.html
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Sur cet excellent site,
- Réinformation : Les infos dont on parle peu n°41 (28 Septembre 2013)
- La démission de Laurent Fabius s'impose : La victoire de la Russie Par Jacques Sapir
- L’Équateur traduit la multinationale Chevron devant la Cour pénale internationale
Syrie : la France terroriste de Fabius humiliée à l'Onu ! L'ambassadeur syrien Bachar Jaafari humilie fabius à l'Onu : "En lisant la résolution, Fabius conclura qu'à partir de maintenant, ni lui ni son pays ne sont autorisés à violer la provision de cette résolution. Cette résolution interdit au gvt français d'inciter au terrorisme, d'inciter à la violence en Syrie. Elle interdit à Paris et au MAE de contribuer à aggraver la situation militaire en Syrie en procurant des armes et un soutien politique» à l'opposition, a-t-il ajouté
http://www.twitlonger.com/show/mof1dq.
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L’état-major français est l’organisme officiel chargé de conseiller et d'assister le Président de la République, chef des armées, et le gouvernement de la France. Il est composé d’officiers militaires qui se chargent de préparer la stratégie de défense du pays, les opérations de contrôle, le renseignement et le déploiement militaire dans les pays étrangers.
Le chef d’état-major des armées est l’amiral Édouard Guillaud, spécialiste de l’application militaire de l’énergie atomique. C’est à lui qu’on doit la lamentable opération Harmattan, l’intervention en Libye qui arma, conseilla techniquement, et entraîna les milices islamistes qu’il fallut combattre l’année suivante au Mali. De plus, il envoya des dizaines de missiles SCALP s’exploser sur le sol libyen. Ces missiles sont produits par la France par l’entreprise MATRA (anciennement spécialiste des transports : on lui doit le métro automatique de Lille), reconvertie dans l’armement lourd, dirigée par le P.-D.G. Lagardère, ami intime des Sarkozy et représentant du syndicat patronal MEDEF aux côtés du frère de l’ancien président, Guillaume Sarkozy. Les activités guerrières de MATRA sont également associées à l’entreprise MBDA, fabricant de missiles pour tous les pays de l’OTAN, et possédée à 37,5% par EADS (entreprise nationale dont les P.-D.G. sont nommés par le gouvernement), et dont le P.-D.G. est un énarque polytechnicien Antoine Bouvier. Ses anciens camarades de classe et amis lors de son passage de 81 à 84 à Polytech’ sont : Fabrice Brégier, directeur général chez Airbus, Frédéric Oudéa, P.-D.G. de la Société Générale, Pascale Sourisse, P.-D.G. de Thales, Marc Darmon son bras droit et Marwan Lahoud, directeur général EADS. Mais ses relations ne s’arrêtent pas là, et comme dans ces milieux, on sait entretenir sur le long terme ses intérêts bien compris, il intègre l’ENA en 1984-1986 et doit serrer les mains de : Philippe Whal, P.-D.G. de Havas, puis de Bolloré, puis de la Banque Postale, Guillaume Pépy, P.-D.G. de la SNCF, Philippe Bas, intime de Chirac et secrétaire général de la Présidence, Jean-François Cirelli, P.-D.G. de Gaz de France, Jean-Claude Mallet, secrétaire général de la défense nationale sous Sarkozy, puis recyclé comme conseiller spécial du ministre de la défense socialiste actuel. Ajoutons à la liste déjà longue quelques préfets, quelques éléphants socialistes députés, sans oublier le dernier, mais pas le moindre (pour le commerce !), Pierre Moscovici, actuel ministre régalien de l’Économie, des Finances et du Commerce. On comprend qu’Antoine Bouvier se réjouisse de voir passer ses commandes de missiles de 2,6 à 3,5 milliards entre 2011 et 2012, avec des VRP de la trempe à Mosco, il n’a pas de souci à se faire ! Business is business.
Ce n’est pas tout. Benoît Puga est général. Il exerce en tant que chef d’état-major particulier du Président de la République depuis 2010. Soufflant à l’oreille de Sarkozy, il est devenu le conseiller de Hollande. Saint-cyrien fils de putschiste d’Alger en 1961, il ira faire le cacou pendant sept ans en Afrique dans des campagnes militaires souvent hasardeuses pour assurer la domination de la Françafrique, puis participera au démantèlement de l’ex-Yougoslavie, s’occupant spécifiquement de la « transition démocratique ». Il a été à cette époque conseiller spécial de Carl Bildt, haut-représentant international, copain comme cochon avec Milosevic, et chaud partisan de la réintégration française dans l’OTAN.
L’état-major est également composé du général Pierre Le Jolis de Villiers de Saintignon, frère du sinistre royaliste vendéen député Philippe du même nom. Ce catholique traditionaliste sera le commandant des forces internationales alliées en Afghanistan. Il participa également à créer le désordre en Serbie et au Kosovo, sous les ordres du Haut représentant de l’ONU, le « guerrier de la paix » Kouchner, et de son ami va-t-en-guerre chef de milices BHL, que l’on retrouve aujourd’hui sur les plateaux télé aux côtés de Natalie Nougayrède, pour nous expliquer que « quand [il] entend le mot ‘paix, paix, paix’, [il] entend le mot ‘guerre, guerre, guerre’ ! (sic) ».
Le sous-chef d’état-major de l’armée française, délégué aux Relations Internationales, est le général Gratien Maire. Il conseille également le gouvernement actuel au sein de la direction de l’état-major. Il a de 2009 à 2011 passé la serpillère à Washington en tant qu’attaché de défense près l’ambassade de France aux États-Unis : son rôle s’est borné à réintégrer la France dans le commandement intégré de l’OTAN (ce que le général De Gaulle avait toujours refusé), pour ainsi faciliter les échanges d’information, l’interopérabilité des opérations militaires, et accélérer la chaîne de commandement (exemple de la « french touch » : 5 mn entre la décision franco-américaine d’intervenir en Libye, l’ordre de bombarder les troupes de Kadhafi et le lancement effectif des missiles SCALP).
Enfin, le dernier, mais non le moindre, puisqu’il est celui qui mérite de recevoir la « laisse d’or » de la soumission de la France aux intérêts impérialistes de l’OTAN - Traité Transatlantique Nord : le général français Jean-Paul Paloméros, dit « le Cerveau », commandant suprême du Commandement allié Transformation, l’un des deux états-majors suprême de l’OTAN, et chargé des questions doctrinales et de transformation opérationnelle. La députée PS Patricia Adam, vice-présidente de la commission de la défense de l’assemblée nationale et amoureuse transie, confie qu’il « est quelqu’un que j’ai toujours apprécié pour la clarté de son langage ». Il refusait d’intervenir en Syrie sans accord de l’ONU. Il faut croire qu’il a changé d’avis, soucieux de ne pas sacrifier sa carrière promise à un brillant « avenir en train de s’écrire » … même au prix du sang made in US !
Il n’y a pas de complot caché où des puissances occultes manœuvreraient pour la domination du monde. Tout se sait, tout est visible. L’impérialisme atlantiste n’est pas plus américain qu’il n’est français, allemand, britannique, turc ou qatari. L’impérialisme atlantiste a pour but de défendre avant tout la propre bourgeoisie nationale des pays membres et les capitaux transnationaux issus des marchés communs européens et transatlantiques. Les intérêts commerciaux et des propriétés capitalistes sont ce qui relie économiquement d’abord, militairement ensuite, les pays du traité transatlantique nord OTAN. Ces intérêts matériels sont connus de tous : les militaires reçoivent leurs ordres des politicards bourgeois et les politicards bourgeois reçoivent leurs ordres des syndicats patronaux des pays et des trusts transnationaux. Il ne leur reste plus qu’à maquiller la domination du monde et les crimes de masse par des concepts débiles tels « le droit d’ingérence » et « la démocratie importée » comme on importe du corned-beef en boîte et des happy-meals. Les médias dominants sont quant à eux les chiens de garde du système : un vote tous les cinq ans, et allez voir ailleurs, SVP !
« On croit mourir pour la patrie : on meurt pour des industriels » : Anatole France, l’Humanité, 18 juillet 1922.
Clément Lorillec
http://www.resistance-politique.fr/article-le-visage-de-l-imperialisme-fran-ais-ou-qui-est-aux-commandes-revelations-119897033.html
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