François Hollande, toujours plus loin dans l’eurolibéralisme
Le Hollandisme néolibéral
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Baisse des dépenses publiques, baisse du coût du travail, choc de simplification, réforme des retraites : il fallait avoir le cœur bien accroché si on était de gauche pendant cette conférence de presse. Emmanuel Todd espérait un virage inverse à celui de 1983, un « hollandisme révolutionnaire ». Heureusement qu’il avait confié à Marianne sa déception et reconnu ne plus y croire. Cette conférence marque au contraire une accélération du virage libéral de la majorité en place, comme l’a bien montré l’allocation préliminaire du président, à la tonalité très libérale et bien peu sociale. .
Tout d’abord, il a souligné que sa gestion était plus rigoureuse que celle de son prédécesseur puisque les dépenses publiques seront stables pour la première fois cette année et baisseront légèrement en 2014. Puis, il a osé affirmer que l’équipe précédente n’avait pas fait de choix courageux sur la compétitivité. Il est quand même assez étonnant d’entendre un président « socialiste » reprocher à un gouvernement de droite de ne pas avoir osé baisser le coût du travail. Mieux, il a eu la transparence et l’audace d’utiliser ce terme ! Laurence Parisot devait être aux anges… Mais, à quoi bon réduire le coût du travail de quelques pourcents quand les monnaies flottent et que le Japon fait baisser le yen de 30% pour relancer son économie, alors que l’euro reste encore et toujours trop cher ? .
Il a ensuite pris exemple sur l’Allemagne, vantant ses 160 milliards d’excédents commerciaux, par opposition aux 60 milliards de déficit de la France. Comment a-t-il pu oublier la baisse de 15% du salaire d’un tiers des salariés allemands depuis dix ans ? En outre, ce modèle n’est pas réplicable. Ensuite, il a continué à développer son « choc de simplification » et annoncé une réforme des retraites (et des régimes spéciaux), égratignant au passage Nicolas Sarkozy en soulignant que sa réforme n’avait pas suffi, et de loin, ce qu’il a aussi fait d’autres fois, sur la croissance ou les déficits. .
Le mirage européen
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En clair, François Hollande fait le choix de l’adaptation de notre pays à la mondialisation pour s’en sortir, ce qui s’illustre par le fait de vanter les succès commerciaux de l’Allemagne, malgré leurs limites. Evoquant le délai de deux ans donné par la Commission pour atteindre 3% de déficit, il l’a présenté comme une victoire diplomatique, affirmant qu’il avait fait bouger les lignes. On pourrait aussi dire que l’UE s’est juste ralliée à un principe de réalité, puisque la plupart des pays ne tenaient pas leurs objectifs. En outre, il y avait une contradiction forte entre son discours de rigueur sur la dépense publique et les impôts, et l’admission que l’austérité était responsable de la récession.
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Et il y a une autre contradiction entre le plaidoyer pour la croissance et la faiblesse des mesures annoncées. On ne sait pas s’il faut pleurer ou rire à l’annonce d’un plan dérisoire de 6 milliards d’euros pour l’emploi des jeunes à l’échelle d’une zone euro dont le PIB est d’environ 10 000 milliards ! Certes, il a annoncé que le Premier Ministre doit lui proposer un plan d’investissement à dix ans dans le numérique, la santé, la transition énergétique et les transports, mais aucun chiffre n’a été avancé. Bref, on sort de cette conférence de presse sans savoir comment la croissance pourrait reprendre. .
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Malgré tout, outre le plan d’investissement, la deuxième grande annonce du président lors de cette conférence de presse était une grande « initiative européenne » : un gouvernement économique de la zone euro (déjà promis par Sarkozy), un plan pour l’insertion des jeunes, une communauté européenne de l’énergie et une union politique à négocier dans les deux prochaines années. On peut se demander s’il ne s’agit d’un moyen pour sous-entendre implicitement que seule l’Europe nous permettra de s’en sortir, alors que plus l’intégration européenne avance, plus nous allons mal. .
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http://www.gaullistelibre.com/2013/05/francois-hollande-toujours-plus-loin.html
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